Avril 2020. Félicitations ma grande, tu viens de recevoir la confirmation du cégep qui t’accueillera en septembre prochain. Un cégep dans lequel chaque pas que tu y feras te fera grandir, où la diversité des âmes en feront la plus belle des richesses. Un cégep dans lequel tu marqueras l’histoire parce que tu feras partie de cette nouvelle cohorte qui débutera un nouveau chapitre sans jamais n’avoir pu lire la fin du précédent. Tu feras partie de cette cohorte qui aura tant attendu la fin de son secondaire sans jamais pouvoir boucler la boucle.
On savait que quelque chose n’allait pas quand le premier ministre, sans crier gare, a confirmé la fermeture des écoles. Tu feras partie de cette belle jeunesse, prise par surprise le 12 mars dernier, qui allait sans le savoir et si rien ne change, terminer son secondaire à la fin de la période 5 de cet ordinaire jeudi après-midi.
La fin du secondaire : les souvenirs qui restaient à bâtir
Août 2015, premier jour du secondaire… Depuis, comme tous tes amis, tu as travaillé avec acharnement, année après année, en ayant comme cible ultime la fin de ton secondaire. Cette étape chargée de petites douceurs, de dures déceptions, de profonds changements. Cette étape riche d’expériences, de précieuses amitiés et de nombreux fous rires. Je sais que ces souvenirs resteront éternellement dans ta tête.
Cependant, les plus précieux, ceux qui étaient à venir et que tu attendais impatiemment, ces derniers “au revoir”… Et ce bal dont tu rêvais depuis longtemps… Il était inscrit et surligné à la page du 18 juin prochain dans ton agenda… Tous ces moments, tu devras les imaginer. Avant même de les avoir vécus, tu devras en faire le deuil.
J’aurais tant voulu que tu vives à fond la fin de ton secondaire. Que tu bâtisses ces précieux souvenirs, comme je l’ai fait il y a longtemps. J’aurais tant voulu que tu les gardes dans ton cœur éternellement. Les miens sont encore bien présents dans ma mémoire et ils me font sourire chaque fois qu’ils refont surface…
La fin du secondaire : les derniers moments forts
J’aurais voulu te voir encourager tes copains lors de leur dernier match d’impro contre vos rivaux. Peu importe le score final, tu aurais crié ta fierté de faire partie de cette école qui était ta deuxième maison depuis cinq ans. Tu aurais sauté de joie avec tous ces amis qui sont devenus ta fratrie et qui nourrissent ton essentiel sentiment d’appartenance.
J’aurais voulu t’entendre me donner enfin la réponse à cette question, celle qui te titillait tant, mais pour laquelle tu t’es retenue de poser à ton professeur parce que tu avais peur du jugement, comme tous ces adolescents. La réponse, tu ne l’auras peut-être malheureusement jamais.
J’aurais voulu que tu chérisses une deuxième fois la lecture de ce message anonyme qu’on avait glissé dans ta case. Ce message qui faisait l’éloge de tout ce que tu es et qui faisait battre le cœur de ce jeune inconnu. Il avait vu juste. Ton passage au secondaire a fait de toi une magnifique jeune femme à l’intérieur comme à l’extérieur.
J’aurais voulu que tu découvres le monde lors de ce voyage humanitaire dont tu rêvais depuis si longtemps. Ce type de voyage que je ne pourrai jamais t’offrir… Les campagnes de financement, les cours d’espagnol… Les vaccins avaient même déjà été injectés. Malheureusement, l’avion n’aura jamais décollé.
J’aurais voulu aller t’entendre jouer de la trompette sur la scène lors du dernier concert prévu avec ton orchestre. J’aurais voulu ne pas pouvoir retenir mes larmes en te voyant avancer sur cette même scène, avec ta toge, pour aller chercher ton diplôme… Ce bout de papier était la dernière page de cette histoire qui restera inachevée…
La fin du secondaire : les dernières… dernières journées
J’aurais voulu que tu sers dans tes bras chaque collègue de classe après qu’ils t’aient écrit un mot dans ton album de finissant. J’aurais voulu que tu puisses enfin dire merci à tous ces professeurs qui, à leur façon, ont semé un petit quelque chose de grand en toi. Particulièrement cet enseignant qui t’a donné cette petite tape dans le dos le jour où tu voulais tout abandonner.
J’aurais voulu te voir marcher les épaules bien droites, les cheveux remontés, le maquillage léger, dans cette robe longue d’un bleu qui te va à ravir. Ta robe de bal… Celle qui attendait de faire de toi une princesse, suspendue dans ton armoire. Tu l’avais dessinée dans ta tête, tu l’imaginais depuis longtemps… Tu l’avais enfin trouvée, deux semaines plus tôt. Comme si elle avait été faite spécialement pour toi. Elle t’allait comme un gant. Vraiment.
J’aurais voulu prendre des photos à tes côtés, comme tous ces parents remplis de fierté, dans le gazon qu’on aurait fraîchement coupé pour l’occasion devant la maison. Je les aurais pavanées sur mes réseaux sociaux comme tous ces parents l’ont fait dans le passé. J’ai presque compté les jours avant que ce ne soit à mon tour. Et dans vingt ans, pour te remémorer cette unique soirée, tu les aurais regardées en murmurant comme on le fait tous : “j’peux pas croire qu’on s’arrangeait d’même”. Tu aurais assurément souri.
J’aurais voulu te voir partir en limousine avec tes amies, endimanchées comme si vous deveniez soudainement des femmes et excitées comme si vous étiez toujours des enfants. J’aurais voulu que tu me racontes chacun des clichés de cet après-bal si convoité. J’ose espérer qu’il y en a quelques-uns que tu m’aurais cachés…
La fin d’une des plus belles étapes de ta vie
J’aurais voulu que tu vives une fin de secondaire à la hauteur des efforts que tu y as mis. Une fin de secondaire aussi brillante que celle dont tu as rêvé. Une fin de secondaire qui t’aurait permis de mettre la clé dans la serrure de cette porte qui s’est ouverte pour toi cinq ans plus tôt afin d’y protéger tes plus beaux souvenirs. Un peu comme on le fait dans un coffre-fort pour y garder précieusement ce qui vaut de l’or.
Ma fille, tu feras partie de la promotion 2020… Celle qui laissera chaque finissant du secondaire avec un petit trou vide dans le cœur, comme toi, parce que tu n’auras pas pu dire au revoir à tes professeurs et parce que tu n’auras pas pu crier ta délivrance le dernier jour du port de ton uniforme… Aussi, parce que l’odeur de cet ami que tu trouvais si beau ne pourra te rappeler ce dernier câlin que vous vous êtes fait ce dernier jour de juin avant de partir chacun de votre côté.
Le secret des plus belles histoires à venir…
Au fond, peut-être que la fin du dernier chapitre devait être laissée en suspend… Grâce à cette histoire inachevée, je sais que tu sauras apprécier chaque instant de cette nouvelle aventure qui t’attend en septembre parce que l’abrupte fin de ton secondaire t’aura appris ce qu’il y a de plus important dans la vie : profiter de chaque instant. Il ne faut jamais rien prendre pour acquis et il faut mordre dans la vie!
Tu as la confirmation de ton admission au cégep entre tes mains. Ce bout de papier est la première page de ce nouveau chapitre… Sois fière. C’est beau! C’est grand! Tu connais maintenant le secret des plus belles histoires. Profite de chaque instant. Ne prends jamais rien pour acquis. Mords dans la vie… Regarde devant… Tu as une nouvelle histoire à écrire et de précieux souvenirs à bâtir.
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Révision par : Caroline Gagnon