Et si je vous parlais de mon expérience ? Parce qu’on n’en parlera jamais assez. Parce que c’est un sujet encore trop tabou dans notre société. Parce que personne n’est à l’abri ni « immunisé ». Parce qu’on a au moins une personne dans notre entourage souffrant d’un problème de santé mentale.
Il paraît simple de croire qu’il suffit d’un bon équilibre de vie pour maintenir son bien-être. Mais maintenir son équilibre, c’est tout un défi. Dans cette ère de la performance professionnelle, personnelle, familiale, sociale, économique… il est facile de s’oublier.
Les problèmes de santé mentale tels que la dépression n’apparaissent pas soudainement. Ils se faufilent sournoisement, au fur et à mesure que l’on s’oublie, que l’on cumule, que l’on pousse la machine encore un peu plus. Au bout du compte, ce sera peut-être une brindille qui nous fera finalement craquer et allumera l’énorme feu de forêt qui n’attendait que de s’embraser. Mais il ne faut pas oublier que ce qui a contribué à allumer ce feu et à l’alimenter, c’est toutes les brindilles, les branches et les arbres qu’on aura accumulés pendant un certain temps.
Sept astuces pour être bien dans sa tête
Dans le cadre de la Semaine nationale de la santé mentale qui se déroulait du 2 au 8 mai dernier, l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM) a dévoilé sept astuces que l’on devrait tous adopter pour notre bien-être individuel et collectif. Ces éléments ont été tirés des nombreuses recherches sur les facteurs de protection en santé mentale. Les voici, accompagnés d’un petit résumé personnel :
- Découvrir
S’ouvrir aux différentes perspectives. Accueillir ce que la vie nous offre. - Ressentir
Comme je le disais plus haut : s’écouter comme on écouterait une amie. Apprendre à reconnaître ses émotions et se donner les moyens de les vivre, de les respecter. - S’accepter
Connaître ses forces, ses capacités, ses faiblesses et les accepter. Bref, être à l’aise avec qui l’on est et avoir le courage de reconnaître qu’on peut être vulnérable tout en tirant profit de nos moins bons coups. S’écouter comme on écouterait une amie et oser dire non. - Agir
Donner du sens à sa vie en ayant des buts et des projets positifs. Être reconnaissant de ce qu’on vit, donner, poser des gestes qui font du bien. - Choisir
Être le maître de soi. Ne plus laisser aux autres les rennes de notre vie. - Créer des liens
Prendre le temps de cultiver ses relations. Donner, mais aussi prendre ce qu’on a à nous offrir. - Se ressourcer
Prendre soin de notre équilibre tant dans le cadre professionnel que personnel, c’est le meilleur moyen pour chasser le stress.
Plusieurs outils sont disponibles en ligne, notamment sur le site du Mouvement santé mentale Québec. On y trouve des astuces pour soi, en tant qu’adulte, mais également pour nos jeunes, car oui, ils sont tout aussi vulnérables que nous. Le stress chez les jeunes n’est pas un mythe. Si vous souhaitez lire sur le sujet, une excellente source est le Centre d’études sur le stress humain dont la directrice et fondatrice est la Dre Sonia Lupien. J’ai eu la chance de l’entendre en conférence l’an dernier et j’ai adoré. Si l’occasion se présente, n’hésitez pas une seconde et inscrivez-vous à l’une de ses conférences!
Quelques statistiques sur la santé mentale
L’Institut de la statistique du Québec a publié un Portrait statistique de la santé mentale des Québécois. Voici quelques chiffres qui en sont ressortis :
- Épisode dépressif
12 % de la population québécoise âgée de 15 ans et plus a vécu un épisode dépressif au cours de sa vie. Les femmes sont plus susceptibles d’avoir vécu un tel épisode au cours de leur vie que les hommes, soit 15 % contre 9 %. - Trouble d’anxiété généralisé
9 % de la population québécoise âgée de 15 ans et plus a vécu un trouble d’anxiété généralisé au cours de sa vie. Les femmes sont plus susceptibles que les hommes, soit 12 % contre 6 %. - Prévalence globale des troubles mentaux
La prévalence de l’ensemble des troubles mentaux au cours de la vie atteint 18 % dans la population québécoise. L’étude a notamment démontré que parmi tous les troubles mentaux mesurés dans l’enquête, c’est l’épisode dépressif qui est le trouble le plus fréquent. - Risque de rechute
D’autres études ont également démontré qu’une personne ayant déjà souffert d’un épisode dépressif a 60% de risque d’en faire un autre au cours de sa vie tandis que celui qui en a fait deux a 70 % de risque de rechute.
Mon expérience
J’ai longtemps brûlé la chandelle par les deux bouts comme on dit.
À la base, je suis une workaholic avec un TDAH qui cumule un emploi à temps complet à l’extérieur en plus de bosser à mon compte à temps partiel. Pendant deux ans, je travaillais des 60-70 heures par semaine. Tout ça en essayant de concilier aussi ma vie personnelle et sociale : couple, enfants, amis. Ça faisait un moment que je me sentais fatiguée. Pas seulement à cause de la charge de travail, mais aussi pour d’autres facteurs personnels. J’étais plus grincheuse, je m’énervais pour un rien.
Puis mon plus jeune est tombé gravement malade. Il faisait des crises qui s’apparentent à de l’épilepsie chaque nuit. Je ne dormais plus… ou presque. S’ajoutaient à ses crises d’autres symptômes en journée. Le bal des hôpitaux, des spécialistes, des nombreux tests a commencé. J’étais en vacances, mais quand est venu le temps de reprendre le boulot après 1 mois de congé, la brindille s’est allumée. J’étais devant l’ordinateur chez mon employeur et j’étais incapable de me concentrer. Encore aujourd’hui, je ne pourrais pas te dire ce que j’ai fait lors de cette pénible journée de boulot. Je ne me rappelle pas avoir travaillé, pourtant, je l’ai fait. Je n’ai aucun souvenir de ce que j’ai pu faire pendant ces 7 heures passées au bureau. Le lendemain matin, j’étais chez le médecin. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Je lui répétais que j’arrivais d’un mois de congé et que ma performance s’était envolée. Je perdais le souffle en racontant. J’avais cette pression sur la poitrine. Celle qui te fait croire que tu es en train d’avoir une attaque et que tu vas mourir dans les prochaines minutes (oui! littéralement mourir). Je tremblais, j’avais chaud, j’étouffais… J’ai vidé mon sac et je me suis rendu compte que mon sac, il débordait depuis bien trop longtemps. J’étais assise dessus pour faire en sorte que tout entre depuis des mois. Le médecin a mis des mots sur ce que je ne pouvais nommer : épisode dépressif avec trouble anxieux et trouble panique. Ça a été un soulagement pour moi. J’étais normale. Juste épuisée, dépassée et malade.
Prendre soin de sa santé mentale et de celle de ses proches, c’est ce qu’on peut offrir et s’offrir de mieux.
Et si vous avez un proche qui souffre d’un problème de santé mentale, je vous invite à être présent. Offrez-lui de l’aide pour alléger sa charge à la maison, mais offrez-lui aussi votre écoute, sans préjugés, sans tabous.
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Révision: Anik Pauzé