La journée où j’ai eu une prise de conscience avec moi-même
par Marie-Christine
Je ne suis jamais entrée dans les standards que la société nous impose. J’ai toujours été plus forte que les autres, plus joufflue, plus dodue sans jamais présenter un embonpoint excessif. Je suis une grande femme, donc la répartition de mon surplus de poids est relativement bien équilibrée, je crois. Je vivais ma vie sans trop de restrictions et avec beaucoup de bonheur, mis à part la crise d’adolescence… Je ne me privais aucunement des bonnes choses, mais j’ai toujours fait des efforts pour ne pas arriver à un point de non-retour. L’image que je projetais m’a toujours un peu dérangée, mais sans en devenir une obsession. Vers l’âge de 16 ans, soit une semaine jour pour jour suivant mon bal de finissants du secondaire, j’ai subi ma première chirurgie esthétique : je me suis fait recoller les oreilles. Rien de très extravagant, et je vous confirme que cela ne me dérangeait pas tant que ça, mais quelques élèves méchants m’avaient déjà fait quelques blagues désobligeantes à ce sujet et j’ai flanché. J’étais loin d’avoir l’allure de Mac et moi, mais une légère différence chez un tiers et on s’en moque littéralement.
Lors de mon époque universitaire, j’avais adopté des habitudes de vie indéniablement plus saines et plus restrictives, tant du côté alimentaire que du côté de l’activité physique. À cette période de ma vie, du temps, j’en avais. J’allais au gym environ 5 jours par semaine. Puis un jour, mon conjoint et moi avons acheté une maison dans les Laurentides. Une année entière me séparait de la fin de mes études. Mon train de vie a alors changé. Le temps libre était désormais une denrée rare. Je voyageais matin et soir, dans le trafic. À la maison, il n’était pas rare que je saute certains repas ou que je m’empiffre de croustilles pour dîner. J’ai donc regagné, une à une, les livres perdues. Et puis surprise! un test de grossesse positif. Un gain de 50 livres s’ajoutait sur mes épaules. Diplôme en main et nouvellement maman, trois mois plus tard, l’histoire se répétait. Enceinte de ma deuxième fille, je n’avais toujours pas perdu le tour de taille qu’avait engendré mon premier bébé. J’ai donc cumulé les livres supplémentaires, encore une fois. Ce fut assez difficile moralement et physiquement.
Je lisais différents blogues sur Internet et beaucoup de femmes étaient dans une situation semblable à la mienne. Toutes se demandaient comment perdre les surplus qui ont accompagné leur grossesse. Il y avait de multiples régimes qui circulaient sur les réseaux sociaux, mais je connaissais l’effet pervers de ces derniers; l’effet yoyo. J’ai aussi lu sur la chirurgie esthétique; la liposuccion pour réduire le tour de taille était une solution que j’ai écartée malheureusement, faute de budget. Je me suis alors mise à faire du sport, plus précisément du cardiopoussette. Au début, j’avais de la difficulté à suivre le groupe, car du souffle, je n’en avais que très peu. La volonté m’aidait à garder le cap sur mon objectif et malgré le fait que je ne voyais que très peu de résultats sur mon physique, j’améliorais grandement mes capacités cardiovasculaires et je me sentais vraiment bien à la suite de cet exercice fort exigeant.
Puis je suis retombée enceinte, un garçon cette fois-ci! J’étais assez loin de mon poids santé, mais cette grossesse fut plus que parfaite, je n’ai pris que très peu de poids grâce à un suivi serré et un indice de masse corporel trop élevé selon mon médecin. Accouchement à 32 semaines d’un mini-bébé de 4 livres et demie, ma bedaine n’avait rien à voir au béluga que j’étais devenue lors de mes grossesses précédentes. Après quelques mois, j’ai pu me remettre petit à petit en forme. J’ai essayé les wraps pour réduire le tour de taille et les shakes (un peu) en cachette.
Un matin, ma fille m’a demandé pourquoi je ne déjeunais pas et je ne prenais qu’un verre de lait (protéiné, bien sûr!). Prise de court, j’ai patiné afin de lui trouver une réponse adéquate et ainsi cacher la vérité. Avec du recul, je crois bien que la honte me hantait. Le culte de la femme svelte et mince n’était pas une valeur que je voulais transmettre à mes enfants, malgré tous mes efforts pour faire partie du lot.
C’est à ce moment que j’ai pris conscience de ce que je faisais, de ce que je devenais. À partir de ce jour, ma vie a littéralement changé. Pourquoi? Parce que je me suis finalement acceptée telle que j’étais, avec mes défauts et mes bourrelets en trop. Après mures réflexions, la perception de mon corps a changé, j’avais enfanté et ma vie ne tournait plus autour de mon nombril et du regard que les autres portaient sur moi, mais plutôt autour de ma famille, mes enfants. L’image idéalisée du corps humain a été effacée peu à peu dans mon subconscient et mon objectif premier est désormais de retrouver mon équilibre, mon bien-être afin de vivre en harmonie avec moi-même et mes proches.
Avant, j’étais trop centrée sur mon moi et j’accordais trop d’importance aux stéréotypes véhiculés partout. J’ai trois beaux enfants en santé, un amoureux idéal qui m’aime et me désire comme je suis, alors pourquoi mon bonheur n’en tenait qu’à un chiffre sur une balance? Oui, je fais toujours attention aujourd’hui, je tente de manger sainement et je pratique plusieurs activités physiques que j’aime. Désormais, je le fais avec le sourire et en entraînant mes enfants dans cette aventure, car non, ce n’est plus une obsession ni une obligation. Je me permets aussi des écarts, et ce, sans remords car mon train de vie n’est plus réglé en fonction de mon poids.
Depuis cette remise en question, mes complexes ont pris le chemin de la corbeille pour laisser la place à la confiance en moi. Je vais désormais à la piscine avec mes tout-petits, en maillot de bain (deux pièces par-dessus le marché!), sans serviette pour me recouvrir et sans jamais me préoccuper de ce que les autres en pensent ou comment ils me regardent. Je profite du moment présent et du plaisir que nous avons à être ensemble pour jouer, rire et patauger dans l’eau. Mon stress d’atteindre la perfection a tellement diminué que finalement, je ne mange plus mes émotions, un vice que je n’arrivais pas à faire disparaître autrefois.
Certains événements surviennent dans la vie d’une personne et peuvent grandement modifier son parcours. Ici, trois grossesses, en autant d’années, ont affecté mon corps, oui, mais surtout ma façon de penser et d’agir. La naissance de mes enfants m’a remise dans le droit chemin et m’a fait comprendre plein de trucs, mais le plus important, c’est qu’il faut être conséquentes dans nos paroles et nos accomplissements. Je tentais d’inculquer des valeurs à mes enfants sans toutefois m’y rattacher moi-même. Le culte de la minceur et de la beauté n’était peut-être pas dans mes paroles, mais dans mes agissements et mes filles le percevaient sans doute. La beauté, ce n’est pas ce que l’on voit de nous dans les yeux des autres, mais plutôt ce que nous voyons de nous-mêmes. Le bien-être est la clé du bonheur.
Crédit photo : Dove (photo 1), Topsanté.com (photo 2) et Lmsm.fr (photo 3)